Bientôt des téléconsultations médicales dans nos prisons?

Alors que les Journées Nationales de la Prison se déroulent jusqu’au 1er décembre en Belgique, la prison de Marche-en-Famenne, sous l’impulsion de la Province du Luxembourg, annonce un projet-pilote de télémédecine en milieu carcéral d’ici le printemps 2019. Une première en Belgique.

La prison de Marche-en-Famenne pourrait bientôt tâter de la télémédecine. Un projet-pilote, s’appuyant sur de la visio-conférence avec appareils connectés (à commencer par un stéthoscope), devrait démarrer au printemps 2019. Nombre de modalités pratiques restent à fixer, mais l’Ordre des médecins soutient au niveau national l’initiative et souhaite même la voir s’étendre à d’autres prisons du Royaume. Le point sur la réflexion avec Magali Coppe, médecin-chef de l’établissement.

«C’est la Province qui est venue vers nous. La téléconsultation lui paraît une solution indiquée pour surmonter le fait qu’il n’y a pas toujours de médecin présent à la prison, que les déplacements pour s’y rendre peuvent être longs et la visite au détenu malade chronophage», retrace le Dr Coppe.

A 80 km au sud, en Gaume, une expérience de préconsultation à distance - avec retransmission au MG des bruits de l’auscultation effectuée par une infirmière - démarre dans une MRS. Elle est également portée par la Province et répond à une logique de bonne gestion des disponibilités des médecins généralistes.

La médecin-chef admet bien volontiers qu’avant ce contact avec l’autorité provinciale, l’option ‘télémédecine’ ne lui avait jamais effleuré l’esprit! "Je trouve qu’instaurée au quotidien, elle n’aurait pas un intérêt flagrant". Car, chaque matin, un médecin assure 2 à 3 heures de consultations auxquelles les détenus s’inscrivent, décrit-elle. De plus, de 7 à 17h, il y a sur place des infirmiers qui gèrent aussi les demandes. «Parfois, on est rappelé pour une urgence - une suture, par exemple. Mais la majorité de leurs appels se règlent par téléphone, sans auscultation ni déplacement.»

«En revanche, de 17 à 7h, quand les infirmiers ne sont plus là, je trouve une plus-value à la télémédecine», nuance Magali Coppe. D’autant, rapporte-t-elle, que les généralistes de Marche-en-Famenne, dès l’ouverture de la prison en 2013, étaient réticents à y venir, s’alignant sur un avis de l’Ordre qui dit que la garde, dans ce milieu, doit être assurée en interne. «Le SPF Justice a bien défini un modus operandi pour les soins non planifiés hors heures ouvrables, en vertu duquel il souhaite vivement une intervention de la garde locale. Mais en pratique, il existe de grosses disparités de fonctionnement d’une prison à l’autre. A Lantin, par exemple, les médecins de prison sont nombreux et organisent une garde entre eux. A Marche, nous ne sommes que quatre.» Est-ce suffisant pour y arriver? Manifestement, il n’y a pas consensus local sur la question.

Une médecine à distance prendrait donc son sens, d’après la médecin-chef, pour des plaintes ponctuelles, surgissant quand les infirmiers sont repartis. Mais qui, dès lors, encadrerait le détenu bénéficiant de la visio-conférence? «Il existe des projets pilotes Assisteo (Désormais rebaptisé Coming) où l’on prévoit des infirmiers comme renforts des MG. Une idée serait que les postes de garde luxembourgeois puissent engager un infirmier qui se rendrait en prison, mais aussi dans les MRS et les centres pour réfugiés, pour assurer ces pré-consultations.» Un scénario original dont Magali Coppe a fait part à la Province, qui s’est montrée, dit-elle, fort réceptive. Il devrait être abordé prochainement en réunion avec les Postes Médicaux de Garde. 

La Province financerait l’expérience, s’occupant e.a. du matériel et des suites logicielles nécessaires, indique le Dr Coppe. Aucun choix n’a été posé à ce stade. Toutefois, «nous avons défini les contours de la solution technique que nous souhaiterions voir mettre en place», explique Natacha Mathy, attachée e-santé auprès de l’Observatoire de la Santé provincial. On s’oriente vers de la visio-conférence avec stéthoscope connecté. «Il y a une présence physique discontinue des médecins à la prison. Quand ils sont rappelés, pour se faire une idée du problème, ils s’appuient sur ce qu’explique l’infirmier au bout du fil. Il nous paraît intéressant d’y ajouter l’image et le son d’une auscultation. Le médecin pourra ainsi mieux estimer la nécessité d’une visite, son délai ou, le cas échéant, décider d’extraire le détenu vers les urgences

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