Un projet de recherche transfrontalier, mené notamment à Mons et soutenu par le programme européen Interreg, vise à développer un bracelet connecté capable de détecter précocement les signes de dysfonction endothéliale, un indicateur clé du risque cardiovasculaire. Porté par plusieurs institutions belges et françaises, ce dispositif pourrait révolutionner la prévention des infarctus et autres complications cardiaques.
Un bracelet connecté est en cours de développement à Mons et à Valenciennes, dont le but est d'évaluer la fonction endothéliale. Ce projet, qui concerne des milliers de Belges et s'étend sur quatre ans, fait partie du programme européen Interreg et regroupe 5 partenaires montois, valenciennois et gantois: le CHU Helora, site Kennedy de Mons, l’Université de Mons, l’École polytechnique de Valenciennes, le Centre hospitalier de Valenciennes et l’Université de Gand.
Avec d’autres intervenants de qualité, experts dans leur domaine, le Pr Stéphane Carlier, cardiologue interventionnel et chef du service de cardiologie au CHU Helora, site Kennedy, s’y investit pleinement: «Le but de notre projet est de dépister les patients avant qu'ils n’arrivent avec une maladie avérée, un infarctus ou une autre complication. Mon travail au fil des années m’a permis de bien réaliser le vieil adage: une once de prévention vaut mieux qu’une livre de guérison. Dépister la dysfonction endothéliale permet de mieux traiter préventivement les sujets à risque.»
Depuis de très nombreuses années, la recherche s’est penchée sur l’évaluation de la fonction endothéliale avec des techniques très invasives. Il existe également des techniques non invasives, mais difficiles à réaliser.
Une meilleure mesure
La recherche menée offre une nouvelle opportunité: «En bloquant la circulation sanguine pendant deux minutes avec un brassard de pression artérielle, nous pouvons mesurer la fonction endothéliale. Concrètement, en gonflant le brassard autour du bras pendant deux minutes, lorsqu’il est relâché, cela va activer la fonction endothéliale. On observe alors une augmentation transitoire de la température des mains, mesurable par une caméra thermique. Pour une personne en bonne santé, une augmentation rapide de la température est constatée, avec même un effet rebond par rapport à la température mesurée avant l’occlusion. En cas de dysfonction endothéliale, la température augmente très progressivement.»
L’objectif est de développer une méthode qui pourrait être déployée à grande échelle pour évaluer plus facilement la fonction endothéliale. «L’idée du bracelet est de simplifier au maximum ce qui se fait actuellement avec une échographie pour mesurer le diamètre de l’artère ou avec une caméra pour mesurer la température. Mesurer le flux sanguin est l’objectif du projet. Nous voulons arriver à mesurer de façon quantitative l’augmentation du flux et la régularité du rythme cardiaque. Pour valider cette recherche, menée avec des ingénieurs à Valenciennes, une caméra thermique sera utilisée comme référence.»
La miniaturisation
Cette caméra thermique, très coûteuse, permettra de quantifier l’élévation du flux qui entraîne l’élévation de la température de la main. «Avec le bracelet, à terme, nous pourrons miniaturiser les différents éléments pour les rendre plus portables et plus accessibles, en développant un système que l’on fixerait autour du poignet et qui donnerait une mesure du flux basal ainsi que de son augmentation après l’épreuve dite ischémique de deux minutes. »
La volonté est de permettre à tout soignant, face à un patient, de réaliser un test de fonction endothéliale en gonflant un brassard autour du bras du patient: «En même temps, avant ce test, on pourrait vérifier la régularité des pulsations, estimer la pression artérielle… À terme, l’idée est d’avoir un outil qui pourra être utilisé chez un médecin généraliste, dans une pharmacie, à l’hôpital…»
Les atouts de l’IA
En cette époque de développement de l’IA, le projet suit aussi cette voie: «Nous travaillons à analyser toutes ces données et à les utiliser au mieux avec un groupe d’experts en intelligence artificielle de l’université de Gand. Ils vont étudier tous ces paramètres et identifier les associations les plus pertinentes pour prédire si un patient est à risque de développer un problème de santé. En fait, il est essentiel d’identifier les sujets à risque et de mettre en place des mesures préventives.»
Comme médecin, ce travail avec les ingénieurs le passionne: «J’ai moi-même réalisé une thèse en ingénierie biomédicale. J’ai ce double bagage, et j’aime beaucoup collaborer avec des ingénieurs pour concrétiser de tels projets.»
Lire aussi: Lancement du projet transfrontalier "SynDigitalPro" à Tournai