(Futur) régime des téléconsultations : retour sur une bataille

En vertu d’un régime transitoire attendu pour le printemps, un médecin pourra attester, par année, 4 consultations téléphoniques et 4 consultations vidéo par patient, au moyen de codes allant remplacer ceux créés en 2020 pour la gestion distancielle du covid. GBO et ABSyM recontextualisent cette proposition qui a soulevé quelques incompréhensions dans la profession - dont un goût de trop peu, en termes de volumes et de tarifs. 

« La proposition dont on vous avait déjà parlé a été acceptée au CTM, le conseil technique médical de l’Inami, puis validée par tous les bancs en médico-mut le 13 décembre », situe Jean-Noël Godin, le directeur du GBO. La téléconsultation étant devenue un outil prisé, des confrères s’interrogent sur ce qui leur apparait comme un recul, des restrictions, et s’en ouvrent à leurs organisations professionnelles. « Le GBO-Cartel a fait le maximum pour ne pas limiter la téléconsultation à 4 par an et par patient. Il est néanmoins conscient que certains MG - et surtout des plates-formes comme Doktr de Proximus - abusent des téléconsultations covid actuelles. » Une analyse du SECM (le service d’évaluation et de contrôle de l’Inami) présentée en médico-mut a révélé chez certains un usage injustifié du pseudocode 101135 (avis continuité des soins), « lié à des contacts téléphoniques (courts), sans TM, facturés en tiers payant, souvent à l'insu du patient ». Dans le régime provisoire qui s’instaurera, les tarifs des consultations téléphoniques ont été réduits (10,10 €) et leur fréquence rabotée.

On sent poindre chez le Dr Herry, le président de l’ABSyM, un début d’agacement. « Critiquer des acquis syndicaux qu’on juge trop maigres, en ne votant pas, en ne cotisant pas, c’est facile. Si on n’avait pas agi dans ce dossier, on n’aurait rien eu du tout ! » Et de rappeler le pourquoi de la création des codes covid en début de crise.  « Au fil du temps, certains ont détourné le principe et ont fait du tout-venant. Se rendent-ils compte qu’en cochant ces prestations comme covid, ils commettent des faux ? Il y a eu une certaine tolérance de l’Inami, vu le contexte covid, mais cette fois, on discutait d’une téléconsultation hors cadre covid. On a dû batailler pour la consultation téléphonique, qui a son utilité dans notre activité. L’Inami, lui, à l’origine, voulait seulement parler de vidéoconsultation. Alors obtenir de pouvoir facturer une dizaine d’euros pour des coups de fil qui vont durer 5 à 10 minutes, est-ce indéfendable ? Dans le cas d’un contact vidéo, plus complet de par le support de l’image, cette durée s’allonge, sans doute à +/-15 minutes et les montants envisagés se calquent sur des honoraires classiques d’une consultation live d’un MG agréé, non accrédité, soit 22,44 €. Sachant qu’il y a un possible gain de temps via la vidéo, est-ce si critiquable ? » 

On perçoit bien des convergences entre les deux mouvements dans leur conception de la télémédecine chez les MG - un outil complémentaire, pas un substitut au contact physique -, dans ce qu’ils veulent combattre - « les systèmes à la Proximus qui überisent notre métier », illustre le Dr Herry, « d’où notre combat pour voir imposée l’obligation d’une relation thérapeutique préalable dans les critères de remboursement », ajoute le Dr Bauval, vice-président du GBO - et dans leurs attentes futures vis-à-vis du modèle. Tant au GBO qu’à l’ABSyM, on rapporte par exemple avoir voulu décrocher un nombre plus important de téléconsultations remboursées pour la patientèle chronique et les personnes âgées.  Ce qui à ce stade a été refusé. On repère aussi une demande de rester attentif aux conséquences de la fracture numérique dans l’option ‘ vidéoconsultation ‘.

« On lance un système, transitoire, progressif. Il fallait bien partir de quelque chose. Les règles en seront modifiables. Il y aura évaluation, pour pérenniser ce qui s’y révèle bon », indique Luc Herry. Jean-Noël Godin place beaucoup d’espoir dans la proposition définitive du groupe de travail (GT) ‘modèle de financement et d’organisation adapté’, « proposition qui sous la houlette des médecins experts Ann Van den Bruel et Jean-Luc Belche et avec une représentation des organisations de médecins et des OA, sera présentée en médico-mut au 1er semestre 2022 pour mise en œuvre à partir de 2023, en vue e.a. d’intégrer la vidéo. Le GBO-Cartel mettra tout en œuvre pour que ce GT débouche sur des réponses concrètes, répondant aux vrais besoins des MG. »

Le dossier laissant peu de gens indifférents, le GBO-Cartel a ajouté par rapport à la semaine dernière quelques réflexions qui sont, dit-il, également débattues au sein de la cellule idoine du Collège. Il interroge la pertinence de lancer ces nouveaux codes au moment où omicron fait exploser les cas. « Les codes covid doivent impérativement rester en vigueur aussi longtemps que la pandémie persiste », suggère-t-il, en questionnant : est-il bien opportun d’initier ce système transitoire alors qu’un GT travaille déjà sur une proposition définitive de nouvelle nomenclature, à soumettre à la médico-mut durant ce 1er semestre? Il estime encore qu’avec le développement des activités de garde, couplé au déploiement du 1733 et à la situation provoquée par la vague omicron, il serait opportun de « créer un code de consultation téléphonique spécifique dédié en particulier aux postes de garde » (en plus du 101835). 

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